Les questions suivantes étaient un peu compliquées : parfois l'artiste prenait un air perplexe qui faisait rigoler le public ! En fait Stéphane Paoli essayait de faire participer tout le monde, y compris Michel Cassé, mais il n'était pas facile de relier l'art de Yue Minjun et l'astrophysique. A un moment Mr Cassé a demandé par exemple pourquoi le ciel était bleu. Après quelques échanges, Yue Minjun a conclu que celui-ci symbolisait la liberté.
Une autre fois, le débat est parti sur le thème de la particule, de la multiplicité (que l'on retrouve dans les tableaux) et de l'unicité. Ce qui était drôle c'est que les questions étaient parfois si compliquées, que les interprètes et l'ami de l'artiste se mettaient à trois pour essayer de traduire !
Ce qui était intéressant c'est que l'artiste expliquait, quand est venue la question de l'absence (des objets, du décor, du sujet), qu'il s'était aperçu qu'un vide permettait de mettre encore plus en avant la chose absente. Par exemple dans le tableau où des personnages tiennent des mitraillettes invisibles, le fait que les mitraillettes soient absentes permet de les rendre encore plus présentes !
Mais on peut dire que les deux français du plateau se "prenaient un peu trop la tête" sur des questions métaphysiques. Car, comme le dit finalement l'artiste à la fin, celui-ci, lorsqu'il peint, ne réfléchit pas à une symbolique, un sens caché, il répond simplement à un besoin spontané. Il n'est pas nécessaire de se demander pourquoi le ciel est bleu ou pourquoi les personnages sont nombreux. Le ciel est bleu parce qu'il est bleu. Pour ma part, il suffit d'un séjour en Chine pour mieux comprendre l'art contemporain Chinois. Celui-ci ressemble à la Chine d'aujourd'hui : les thèmes abordés, les couleurs, le cynisme... On retrouve ces mêmes éléments dans les livres de Mo Yan et la littérature chinoise contemporaine. L'art contemporain Chinois est aussi, comme on l'avait vu, un art à message, et pour moi il dénonce souvent les atrocités subies par le peuple Chinois dans le passé, tout en essayant de ne pas être censuré. Ou alors il décrit la Chine d'aujourd'hui. C'est un peu simple comme explication, mais pour moi, il suffit donc d'avoir été un peu en Chine pour comprendre cet art. Il n'est pas nécessaire de trouver des explications métaphysiques.
En fait, on peut dire que ce moment, ce débat, était historique : la confrontation Orient-Occident, la pensée logique de l'occident contre la pensée "globale" et "en mouvement" de la Chine.
Donc pour moi c'était un moment très intéressant, mais il reste quand même du chemin à faire.
Par exemple Michel Cassé était assez modeste dans ses réponses, mais il était un peu trop fier de lui dans ses questions, ce qui faisait un peu "arrogance française".
Les questions les plus intéressantes, étaient donc pour moi les deux dernières questions, lorsque Stéphane Paoli a compris qu'on ne parle pas à un artiste Chinois comme on parle à un artiste français : il a demandé à Yue Minjun si celui-ci était surpris de nos réactions d'occidentaux face à ses œuvres. Malheureusement l'interprète a traduit la question en utilisant le terme "surpris" comme s'il était péjoratif, et l'artiste a simplement répondu qu'il n'était pas surpris, mais content de ces réactions.
Puis la dernière question était "Et vous, riez vous souvent?", à laquelle l'artiste répondu qu'il riait effectivement de temps en temps, mais qu'il ne fallait pas rire trop longtemps, sinon les gens pensaient qu'on était fou ! "有问题" Ce qui a beaucoup fait rire le public !
En conclusion, je trouve que c'était à la fois très émouvant, et à la fois il reste beaucoup de chemin à faire.
Comme pour ce Français qui à la fin du débat à demandé à l'artiste de signer sa copie (sans doute achetée au marché). Nous étions plusieurs à être très choqués ! Yue Minjun est un grand artiste, un des préférés des mécènes Chinois, dont les toiles se vendent des millions chez Sotheby's et Christie's, et il mérite un minimum de respect !
En tout cas bravo à Stéphane Paoli, dont la tâche n'était pas aisée, et bravo à la fondation Cartier !
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